Les Menus Plaisirs du Roy … l’émerveillement des autres

L’exposition présentée aux Archives Nationales Dans l’atelier des Menus Plaisirs du roi a bénéficié d’une réclame inattendue suite à la grève qui en a interdit l’accès le lendemain même de son ouverture. Elle était en quelque sorte devenue un trésor inaccessible que seuls quelques privilégiés avaient pu découvrir.

Il s’agit de présenter des extraits des recueils des Menus Plaisirs, constitués en 1753 par Levesques , à l’occasion de la mise en ligne de ces richesses. Le tricentenaire de la mort de Jean Berain père (1640-1711) est aussi l’occasion de présenter nombre de ses dessins. Les recueils rassemblent les projets de décors (fêtes, théâtres, opéras, pompes funèbres, …) et les esquisses de machineries pour les spectacles offerts à la cour pendant la période 1643 (mort de Louis XIII) à 1753, soit un gros siècle, l’âge du baroque et évidemment des fastes versaillais.

Je ne m’étendrai pas renvoyant au site des Archives Nationales qui présente exhaustivement les recueils et qui permet d’avoir une belle idée de ce dont il s’agit. (cf le lien en fin du post)

Certains projets sont extraordinaires : la spectaculaire perspective de l’architecture envisagée par Vigarani pour l’acte IV du Thésée de Lully (1675); le décor subtilement onirique de monuments baroques envahis de végétation prévu par Bérain pour la troisième entrée de l’Europe galante (1697) ou le décor plus tardif (1757) d’Algieri pour les jardins d’Amathonte, acte I des Surprises de l’Amour où en fond de scène est une vue du bosquet des Trois Fontaines de Versailles. Les dessins de Vigarani pour les plaisirs de l’Ile enchantée (1664), rappellent, de même, à quel point vrais décors et vrai théâtre se mêlent et s’entrecroisent, se fécondent les uns les autres. Les projets de feux d’artifice prévus par Bérain ou Vigarani stupéfient par leur luxe incroyable : le Grand Divertissement Royal de 1674 – qui plut tant qu’il fallu conserver les décors pour faire plusieurs fois jouer les feux – renvoie les spectacles pyrotechnique modernes à leur rang de gentils amusements d’amateurs : cinq kilomètres de décors embrasées autour du canal … on n’ose y croire.

Les dessins de machineries sont peut être ce qu’il y a de plus magique : Bérain nous révèle la mécanique qui permet de faire surgir de scène des monstres infernaux ou descendre des cintres une divinité de l’Olympe. Chars, monstres marins, nuages et tonnerres, fontaines et feux, tout est dessiné – souvent avec une remarquable sureté de main – et suscite le rêve. Alors l’imagination court perdu dans ces palais d’utopie, ces jardins inconcevables, au milieu des chanteurs, des acteurs et parfois des chevaux. On croirait entendre les pétards extravagants des milles feux qui embrasent le canal. On part frémir aux grognements infernaux d’improbables monstres marins vomissant flammes et malédictions et frissonner à l’apparition éblouissante d’Apollon surgissant sur son char de Soleil… L’enfant en nous galope, court, s’enfuie et se retrouve, rêve et joue au son des fifres et des tambours … serrant la main qui le protège et l’attache au monde.

La magie du théâtre est là … insurpassable et quand on rêve béat devant les dessins de Bérain… insurpassée.

Emerveillement.

http://www.culture.gouv.fr/documentation/archim/menus-plaisirs.html

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